Matmatah

Tout commence en septembre 1995, lorsque Stan et Sammy qui, à cette époque, formaient un duo appelé “Tricards Twins”, rencontrent Eric puis Fanch, dans les bars de Brest. Ils font leur premier concert le lendemain. Cette genèse presque improvisée, typique de l’esprit rock, pose déjà les fondations d’un groupe qui privilégiera toujours l’authenticité et la spontanéité.

Matmatah est fondé en 1995 à Brest, en Bretagne, composé à l’origine de Tristan Nihouarn, Eric Digaire, Jean-François Paillard et Cédric Floc’h. Le groupe se forme alors que Tristan Nihouarn était encore étudiant en mathématiques supérieures, témoignant de cette période de la vie où tout semble possible et où les choix de carrière ne sont pas encore figés.

Le nom Matmatah est tiré de celui de la ville Matmata, en Tunisie, où Stan a passé des vacances durant son enfance. Il est d’ailleurs insolite de constater que Matmata est un village troglodyte du sud tunisien où fut tourné la Guerre des Étoiles. Ce choix de nom évoque déjà un ailleurs, un exotisme qui contraste avec l’ancrage breton du groupe, créant une tension créative entre le local et l’universel.

L’identité musicale : le mariage du rock et des racines bretonnes

La musique de Matmatah est un mélange de rock classique de la fin des années 60 et du début des années 70, enrichi de sonorités bretonnes qui feront leur signature distinctive. Le groupe fusionne rock, musique traditionnelle bretonne, blues et folk, créant un style que l’on qualifiera rapidement de “rock celtique”.

Cette approche permet à Matmatah de toucher simultanément plusieurs publics : les amateurs de rock pur et dur, les passionnés de musiques traditionnelles, et ceux qui cherchent simplement une musique festive et authentique.

Interrogé sur ce que représente la Bretagne pour Matmatah, Tristan explique : “C’est notre point de départ, même si Brest c’est une enclave bretonnante qui n’est pas si bretonnante que ça d’ailleurs”. Cette relation ambivalente avec leurs racines bretonnes – revendiquées mais jamais instrumentalisées – caractérise la subtilité de leur approche artistique.

Le groupe refuse d’être enfermé dans le rôle d’ambassadeur régional tout en assumant pleinement cet ancrage territorial qui nourrit profondément leur créativité.

Le premier album de Matmatah, La Ouache, arrive fin 1998 et connaît un succès incroyable qui propulse le groupe sur le devant de la scène rock bretonne et française. L’album s’écoule à plus de 900 000 exemplaires, un chiffre absolument phénoménal pour un premier album d’un groupe indépendant.

La notoriété de Matmatah dépasse les frontières du Finistère fin 1998 avec la sortie de leur premier album, La Ouache, produit par Claude Chamboisier (Club Dorothée). Le groupe séduit en France, mais aussi dans une bonne partie de l’Europe de l’Ouest où le rock celtique jouit d’une nouvelle popularité.

L’album contient notamment les tubes Lambé An Dro, Emma et L’Apologie. Des titres comme L’Apologie, Lambé An Dro, ou Au Conditionnel s’inscrivent dans les esprits de toute une génération. Ces chansons deviennent instantanément des hymnes générationnels, fredonnés dans les bars, les festivals et les soirées étudiantes.

“Lambé An Dro” en particulier, avec sa fusion de rythme traditionnel breton et de rock énergique, incarne parfaitement l’identité du groupe et devient leur morceau signature.

Malgré un passage au tribunal en 2000 pour “provocation à l’usage de stupéfiants” dans des tubes tels que “Lambé An Dro” et “L’Apologie”, le groupe ne perd pas sa dynamique. Cette affaire, loin de nuire à leur popularité, renforce paradoxalement leur image de groupe authentique et non formaté, refusant l’autocensure.

En 2001, Matmatah sort un second album intitulé Rebelote. Néanmoins, en renonçant en quelque sorte à leurs origines bretonnes, ce qui était particulièrement apprécié par le public, ce nouvel opus ne rencontre pas le même succès. L’album s’écoule néanmoins à plus de 230 000 exemplaires, un chiffre très honorable même s’il reste loin des performances de “La Ouache”.

Forcément, après l’immense succès de La Ouache et le grand nombre de concerts donnés par le groupe, les quatre Brestois étaient attendus au tournant. Loin de toutes ces questions, Rebelote en surprendra plus d’un, beaucoup seront déçus, d’autres sceptiques, et certains seront charmés par cet album.

Avec “Rebelote”, Matmatah choisit de s’affirmer comme groupe de rock à part entière, sans renier ses racines mais sans non plus s’y cantonner. Cette évolution artistique, courageuse mais risquée, divise le public entre ceux qui souhaitaient retrouver l’esprit festif et celtique du premier album et ceux qui apprécient cette maturité nouvelle.

L’album contient notamment “La Serpentine”, une chanson qui évoque les méandres de l’amour et de la vie avec une musique entraînante et dynamique, se distinguant par ses rythmes envoûtants et ses paroles poétiques.

Matmatah produit ensuite Archi Kramer en 2004. Cet album très bon pointe la volonté de n’être pas qu’un groupe de rock, multipliant les influences et les expérimentations sonores.

Le groupe sort La Cerise en 2007, dernier album avant la séparation. Ce disque marque la fin d’un premier cycle pour Matmatah, après plus d’une décennie d’existence intense.

La Séparation (2008) : la fin d’une époque

Annoncé dès la fin 2007, les quatre Brestois décident de mettre un terme à la belle aventure après la tournée qui les conduira jusqu’à l’été 2008. Malgré les succès, le groupe annonce sa séparation en 2008.

Cette décision, prise au sommet de leur notoriété, témoigne d’une intégrité artistique : le groupe préfère s’arrêter plutôt que de poursuivre par simple routine ou pour des raisons commerciales. Cette séparation marque la fin d’une ère du rock français et laisse de nombreux fans orphelins de leur énergie scénique légendaire.

La Reformation (2016) : le retour triomphal

Après une séparation en 2008 et une reformation fin 2016, le groupe brestois publie son nouvel album Plates Coutures en 2017. Ce retour, huit ans après la séparation, ravit les fans qui n’espéraient plus revoir le groupe sur scène.

Depuis leur reformation en 2016, ces Brestois ont livré près de 100 concerts, de la France à la Corée du Sud, en passant par la Belgique, les USA, le Québec, la Suisse jusqu’à l’été 2018. Cette tournée internationale prouve que Matmatah reste une valeur sûre du rock français, capable d’attirer les foules bien au-delà des frontières hexagonales.

Les sessions de l’album suivant sont marquées par le remplacement d’Emmanuel Baroux par le jeune guitariste Léopold Riou, apportant un sang neuf au groupe tout en préservant son identité musicale.

“Miscellanées Bissextiles” (2023) : le double album expérimental

Cinq ans après le succès de Plates Coutures et de la tournée colossale qui s’en est suivie, Matmatah revient avec un sixième album hors normes. C’est le premier double album du groupe, qui revient au rock celtique qu’ils avaient exploré sur le premier album La Ouache.

Le double album comprend 14 titres répartis sur deux CD, avec notamment “Erlenmeyer” (19:06 minutes), “Populaire”, " Brest-même", “Obscène Anthropocène”, et “La posologie”. La présence d’un morceau de près de 20 minutes témoigne d’une ambition artistique renouvelée et d’une liberté créative totale.

Plus libres que jamais, les Français construisent un double album au format hors cadre qui nous happe de sa diversité entre pop populaire et rock proche de l’expérimentation bretonne. Avec une énergie qui ne faiblit pas, Matmatah nous envoie une nouvelle volée de titres au dansant engagé.

Un double album qui synthétise les différentes influences musicales du groupe, “Miscellanées Bissextiles” apparaît comme l’aboutissement de près de 30 ans d’existence, un album-somme qui réconcilie toutes les facettes du groupe.

Quatre ans après cette tournée sold out, Matmatah reprend la route dès mars 2023, prouvant que l’appétit scénique du groupe reste intact et que le lien avec le public demeure aussi fort qu’aux premiers jours.

Pionniers du rock celtique français

Matmatah est l’un des groupes les plus marquants des années 2000. Pendant 13 ans, Matmatah va déchaîner les foules sur toutes les scènes de France et d’Europe. Groupe précurseur et déterminant de l’avènement du Rock Celtique en France.

Avant Matmatah, le rock celtique était un genre marginal en France. Le groupe a démontré qu’il était possible de fusionner les sonorités traditionnelles bretonnes avec le rock moderne sans tomber dans le folklorisme facile ou la world music édulcorée. Ils ont ouvert la voie à toute une génération de groupes qui exploreront à leur tour cette veine.

Matmatah a prouvé qu’un groupe pouvait connaître un succès national massif sans passer par Paris, en restant fidèle à son identité régionale. Cette réussite a encouragé de nombreux artistes de province à croire en leur propre ancrage territorial comme force plutôt que comme limitation.

Le groupe a également démontré qu’il était possible de faire du rock en français sans complexe, à une époque où l’anglais dominait encore largement le genre.

Le style scénique : l’énergie brute

Matmatah s’est forgé une réputation de groupe redoutable en concert. Leur énergie scénique, leur capacité à enflammer les foules et à créer une communion avec le public font partie intégrante de leur légende. Les concerts de Matmatah sont décrits comme des moments de liesse collective où la musique, la sueur et l’émotion se mêlent dans une célébration sans retenue.

La capacité du groupe à remplir les salles après leur reformation, près d’une décennie après leur séparation, témoigne de la profondeur du lien tissé avec leur public. Matmatah n’est pas qu’un groupe qu’on écoute : c’est une expérience générationnelle, un marqueur identitaire pour tous ceux qui ont grandi avec “La Ouache” ou découvert le groupe lors de leurs premières années.

Une légende du rock français

Matmatah incarne une réussite rare dans le paysage musical français : celle d’un groupe qui a su imposer son identité unique, fusionnant rock et traditions bretonnes, sans jamais sacrifier l’authenticité à la facilité commerciale. De leurs débuts improbables dans les bars brestois au succès phénoménal de “La Ouache”, de leur séparation courageuse à leur reformation triomphale, Matmatah a écrit l’une des plus belles histoires du rock français contemporain.

Avec près de 30 ans d’existence (séparation incluse) et un catalogue qui s’étend désormais sur six albums, le groupe a prouvé sa capacité à se réinventer tout en restant fidèle à son essence. “Miscellanées Bissextiles”, ce double album ambitieux sorti en 2023, démontre que Matmatah n’a rien perdu de sa créativité ni de son appétit musical.

Plus qu’un simple groupe de rock, Matmatah est devenu un symbole : celui d’une Bretagne moderne et ouverte sur le monde, celui d’une musique qui refuse les cases et les étiquettes, celui d’une intégrité artistique qui ne cède jamais aux sirènes de la facilité. Pour toute une génération, Matmatah restera à jamais synonyme de cette énergie brute, de cette joie festive et de cette authenticité sans fard qui ont fait la beauté du rock français des années 2000.

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