Dernière soirée du Poprock Festival qui orchestre une montée dramatique qui synthétise parfaitement l’esprit du
festival : de la longévité rock décalée aux héritages assumés, de l’intimité brute aux renaissances internationales.
Entre expérience personnelle et reconnaissance mondiale, entre rock complexe et simplicité cathartique, cette soirée de
clôture promet de révéler toutes les temporalités qui cohabitent dans la musique contemporaine.
L’exercice ultime : conclure un festival par une leçon de persévérance artistique, du plus confidentiel au plus
universel.
Arrivé en retard pour le concert de Simone Ringer, j’entrevois juste les deux derniers morceaux du set de Climax.
Cette longévité exceptionnelle, vingt ans à balancer avec ferveur et ironie leur rock sauvage et décalé, témoigne d’une
capacité rare à préserver l’authenticité créatrice face aux modes éphémères.
Leur parcours, du Montreux Jazz au Bilbo Rock de Bilbao, révèle des musiciens qui ont su conquérir toutes sortes de
scènes sans snobisme aucun, approche démocratique de l’art qui correspond parfaitement à l’esprit du Poprock.
Cette alchimie annoncée entre flûte traversière et gros amplis, vocoder et guitares graisseuses pour livrer une musique
joyeuse et bordélique, profonde et déjantée aurait parfaitement incarné cette capacité suisse romande à transformer
l’éclectisme en force créatrice.
Coup de cœur avoué du programmateur, Raphaël Alexandre Weber justifie pleinement cette distinction avec une
démonstration de rock introspectif qui transforme l’intimité du hangar en confessionnal sonore. Son pseudonyme, brut,
cru, à vif, révèle immédiatement l’approche esthétique : faire de l’expérience personnelle et des histoires secrètes la
matière première de compositions aux “arrangements complexes et pleins d’émotions”.
Cette transition de The Rambling Wheels vers le projet solo témoigne d’un musicien neuchâtelois qui a trouvé dans
l’introspection sa véritable voie artistique.
Ses morceaux rock, loin de la démonstration technique gratuite, servent une exploration émotionnelle profonde qui
résonne parfaitement dans l’acoustique particulière de Gilly.
Cette capacité à transformer la vulnérabilité en force créatrice révèle un artiste qui maîtrise parfaitement l’art
difficile de l’authenticité sans complaisance.
Tête d’affiche de cette soirée finale, le fils de Don Cherry transforme son retour en Suisse en événement historique.
“Back on Track”, son sixième album studio sorti en 2023, confirme cette appréciation renouvelée des concerts née des
défis pandémiques, révélant un artiste qui a su transformer la contrainte en renaissance créatrice.
Cette approche mature de la célébrité, loin de l’arrogance habituelle des stars mondiales, témoigne d’un musicien
enthousiaste et reconnaissant de renouer avec ses fans du monde entier.
Dans l’intimité exceptionnelle du Poprock, ce retour aux sources trouve sa résonance parfaite : loin des grandes arènes
impersonnelles, Eagle-Eye Cherry redécouvre cette expérience vraiment spéciale que procurent les concerts confidentiels.
“Save Tonight”, ce tube qui a défini sa carrière, résonne différemment dans le hangar du Poprock, retrouvant cette
dimension humaine que les stades ont souvent effacée.
Son choix du Poprock pour entamer son retour en Suisse révèle un artiste qui privilégie l’authenticité de l’échange sur
le spectaculaire commercial.
Cette troisième et dernière soirée réussit l’exercice difficile de la synthèse finale.
Entre l’introspection brute du coup de cœur local et la renaissance internationale de la légende suédo-américaine,
le Poprock 2025 se conclut sur une leçon d’humilité artistique.
Cette programmation démontre que l’authenticité peut prendre mille formes, de l’exploration personnelle aux
retrouvailles avec un public mondial, pourvu qu’elle serve une vision cohérente.
L’intimité du hangar de Gilly transforme chaque prestation en révélation privilégiée, prouvant que les grands moments
musicaux naissent souvent de la rencontre entre exigence artistique et simplicité humaine.
Cette clôture parfaitement calibrée confirme le statut du Poprock comme laboratoire privilégié de la création
contemporaine, festival qui refuse obstinément la facilité pour célébrer l’art véritable.
Le millésime 2025 restera comme une démonstration éclatante que l’excellence musicale peut naître partout, y compris
dans un hangar perdu au cœur du vignoble vaudois.